Archag Tchobanian – Արշակ Չոպանեան |
Archag Hovhannes Tchobanian 1872-1954 est né dans un faubourg arménien de Constantinople(Istanbul). Sa mère meurt, un mois après l’avoir mis au monde, son père était un modeste orfèvre. Il a été l’école locale Makruhianet et plus tard au collège arménien de Bechiktach où il reçoit une solide formation en langue arménienne. Il était érudit, poète, dramaturge, critique littéraire, journaliste et traducteur. Il a joué un rôle essentiel dans le mouvement arménophile en France.
Au début de sa carrière littéraire, il a commencé l’écriture et la traduction de plusieurs périodiques: Burastan, Mankantz, Arevelik, Massis, Hayrenik. En 1895, il a assuré la rédaction d’un autre périodique, Tsaghik, il s’agissait d’une mesure de courte durée, car il s’est enfui à Paris la même année pour échapper à la persécution par les Turcs. A Paris. Il a fondé Anahit (1898-1911- rétablit en 1929-1940) et à nouveau relancé en (1946-1949) et qui est devenu ensuite une célèbre revue littéraire culturelle. Il a également contribué par ses talents de rédaction, à deux autres périodiques de courte durée, Veratznound (1917-1919)et Apaga (1921-1924).Membre du Ramgavar parti il a couvert toutes les questions du jour. Ses possibilités était étendues. Il fut l’un des premiers poètes à intégrer les formes et goûts occidentaux dans la littérature arménienne. On se souvient de Tchobanian pour la constitution des étapes formatrices pour la critique littéraire dans les lettres arméniennes. Il a rendu des études critiques littéraires de Nahapet Kuchak et d’autres écrivains, notamment Petros Dourian, Meguerditch Pechtishkalian. Il a été le premier à analyser les écrits de Saint-Grigor Narekatsi. (Grégoire de Narek) en reconnaissant son travail, pas uniquement pour sa valeur religieuse. Il a documenté l’héritage de Saint Grégoire en tant que distingué chef d’œuvre littéraire. Si Saint Grégoire est apprécié et révéré aujourd’hui comme un des plus grands auteurs du monde, il faut le mettre au crédit de Tchobanian. Il a également écrit les critiques littéraires des écrivains occidentaux, Victor Hugo, Honoré de Balzac, Émile Zola, Henri Ibsen, Emile Verhaeren et aussi des écrivains russe Alexandre Pouchkine, Nikolaï Gogol, Ivan Sergueïevitch, Turgeniev et Léon Tolstoï. La traduction de Tchobanian dans le français, d’auteurs modernes et médiévaux arméniens, est un de ses grands legs. L’un de ses projets, dont la mort accidentelle ne permit pas la réalisation, était la publication, en un volume intitulé, (Un an à Paris).Il meurt à Paris en 1954 d’un accident de la circulation. Ci-dessous CRDA: extrait de la Lettre de Komidas Vartabed à Archag Tchobanian 1912. Constantinople, le 28 décembre 1912 Cher Archag, Si parfois l’union et l’harmonie nous ont fait défaut, c’est que nous n’avons jamais soufflé librement, même pendant les époques de nos semblants d’indépendance. Harcelés par l’ignorance et l’obscurantisme, les invasions et les pillages, le fer et le feu, nous avons su garder un je ne sais quoi d’irréductible, un espoir à toute épreuve, dirigeant nos yeux vers le flambeau de lumière de l’avenir, vers le flambeau, qu’après d’avoir perdu sa royauté et son gouvernement le peuple arménien a porté au sommet élevé de l’Aragatz, pour le suspendre au plafond invisible du ciel, par un fil immatériel, afin que les hordes obscures et avides ne puissent l’atteindre, et que sa lumière nous éclaire et nous permette de rêver à notre avenir. Tu fus le premier à décrire l’âme créatrice de nos aïeux et à montrer à l’étranger, aux enfants du monde civilisé, que nous suivons le même sentier qu’eux, que nous marchons sur le même sol, que nous tenons aussi une source lumineuse que les démons ont en vain essayé d’éteindre, et que ce sont eux qui ont péri, tandis que nous brasillions sous les cendres, confiant dans la science et la lumière qui, bien que nous ayant appartenu, en tant qu ‘enfants de l’Orient, sont sorties de nos mains pour éclairer l’Europe. Puisque nous reconnaissons bien le prototype et les possibilités de notre pensée qui nous éclaire, à présent, depuis l’Europe, pourquoi ne pas avoir notre flambeau lumineux entre nos mains? Tu fus le premier à inviter le monde civilisé à faire connaissance avec les créations artistiques des Arméniens… Réjouis-toi donc en toute quiétude! Prends des forces et donnes-en, tiens-toi solidement sur tes jambes, afin que les vagues séculaires aspirant à la liberté ne se brisent par derechef contre les écueils, ce qui pourrait nous être fatal. Laissons de côté, à présent, les sentiments, pour examiner la réalité. Nous ne devons pas nous séparer, nous ne devons pas nous laisser abuser par les propos mensongers de l’Europe. Nous devons nous réunir et nous engager sur le chemin pratique. Selon moi, le premier pas est de rassembler tous les Arméniens sous le règne de la Russie, et le second, de nous développer économiquement et moralement, nous guidant par des idées purement nationales, et non par des idées étrangères et indigestes pour nous. Le troisième pas c’est la révolution qui le fera. Mais nous profiterons de ce pas, à condition de nous y préparer et de nous engager dans un sentier purement national, à l’instar des Polonais. Les idées humaines de l’Europe, en dépit de leur attrait, ne nous sont pas utiles. Les plantes des pays froids s’étiolent bien vite sous le soleil ardent de notre pays. Je ne crains pas que nous risquions de nous dissoudre dans le gouvernement russe. Même si une dissolution partielle avait lieu, notre conscience nationale est déjà en éveil et nous aurions tout à y gagner. C’est mon opinion. Avec mes vœux cordiaux d’ardeur, d’énergie et de courage, je souhaite que le cadeau de Nouvel An que tu nous prépares soit modeste et bon.
Rassemblé et traduit par Alys |